Le Labour a ouvert dimanche son congrès annuel, revitalisé par sa bonne performance aux élections législatives anticipées grâce à un programme anti-austérité sur lequel son leader, Jeremy Corbyn, compte continuer à mettre l'accent avec le 10 Downing Street en ligne de mire.
Le parti travailliste avait créé la surprise aux élections de juin et conforté sa place de premier parti d'opposition en gagnant 30 sièges de députés supplémentaires face aux conservateurs, un plébiscite pour les mesures résolument à gauche défendues par M. Corbyn, un an après sa réélection chahutée à la tête du Labour.
"Ces élections ont changé la politique dans ce pays", a déclaré celui-ci dans une interview au quotidien The Guardian vendredi. Il a ajouté que "la force du parti" serait le thème central de la conférence qui se déclinera sur quatre jours à Brighton, station balnéaire du sud de l'Angleterre.
Le Labour est "plus fort que jamais" tandis que le gouvernement conservateur est "en perte de vitesse", a-t-il insisté dimanche sur la BBC.
Selon un sondage de l'institut Yougov réalisé mi-septembre, le Labour dépasse désormais de peu les Tories de la Première ministre Theresa May dans les intentions de vote, à 42% contre 41%. Un score encore impensable il y a un an, quand l'autorité de l'eurosceptique Jeremy Corbyn était contestée par une frange importante des cadres et députés travaillistes.
Ils estimaient alors leur leader, aujourd'hui bien installé, incapable de les mener au pouvoir et lui reprochaient son manque d'enthousiasme pour défendre le maintien du Royaume-Uni au sein de l'Union européenne durant la campagne du référendum ayant acté le Brexit en juin 2016.
- Le Brexit au menu -
Un an plus tard, le Labour n'a toujours pas clarifié sa vision du Brexit, dossier brûlant qui s'invitera dans les débats du congrès, même si le parti s'est engagé à maintenir, s'il est au pouvoir, le Royaume-Uni dans le marché unique européen pendant une période de transition.
Le pays restera-il membre du marché unique au-delà de cette période transitoire? C'est "ouvert à la discussion", avait estimé Jeremy Corbyn début septembre.
Dans une lettre ouverte publiée dimanche dans The Observer, 30 députés, maires et élus européens du Labour ont appelé le parti à s'engager clairement en faveur d'un maintien du Royaume-Uni dans le marché unique et l'union douanière.
Mais leur leader semble déchiré entre la nécessité de tenir compte de cette position et celle de respecter la volonté des millions de personnes qui, dans les fiefs travaillistes, ont voté pour un départ du bloc européen.
Sur la BBC, il a dit vouloir "assurer un accès sans droits de douane au marché européen" tout en ajoutant qu'il fallait "étudier soigneusement les termes de toute relation commerciale" car le marché unique porte en lui "des restrictions", en matière d'aides d'Etat notamment. "Je pense que nous devons être prudents sur les pouvoirs dont nous avons besoin en tant que gouvernement national", a-t-il dit.
- 'Prêts pour des élections' -
C'est notamment pour se sortir de ce dilemme sur le Brexit que l'ex-syndicaliste de 68 ans a mené une campagne législative axée sur les problèmes intérieurs et sociaux du Royaume-Uni, une tactique qui s'est révélée payante et qu'il entend poursuivre. Lors d'un rassemblement en plein air à la veille de la conférence, samedi soir, il a fustigé les conservateurs comme étant "le parti des riches, pour les riches".
Même The Economist, influent magazine britannique du monde des affaires, a reconnu le succès de Jeremy Corbyn et n'exclut plus la possibilité qu'il puisse un jour accéder au pouvoir face à une droite fragilisée depuis qu'elle a perdu sa majorité absolue au Parlement. C'est "le prochain Premier ministre le plus probable de Grande-Bretagne", affirme-t-il.
"Nous sommes prêts pour des élections", a assuré dans le Guardian Jeremy Corbyn, qui a appelé plusieurs fois Theresa May à démissionner et à organiser de nouvelles élections, les prochaines législatives étant prévues en 2022.
Entretemps, Jeremy Corbyn a renforcé son emprise sur le Labour, faisant approuver par le comité exécutif national (NEC) une mesure accordant plus de poids à la base et aux syndicats - qui lui sont plus favorables - dans cette instance dirigeante.