par Tim Hepher
PARIS (Reuters) - Airbus (EPA:AIR) étudie la possibilité d'un remaniement de sa direction pour rétablir de facto un directeur distinct pour sa division d'aviation commerciale et permettre ainsi au président exécutif Guillaume Faury de se focaliser sur des priorités stratégiques plus larges, a-t-on appris de sources au fait du dossier.
A l'heure actuelle, Guillaume Faury cumule les fonctions de directeur général du pôle d'avions commerciaux d'Airbus, en pleine période de perturbations post-COVID, et de président exécutif du groupe d'aérospatiale et de défense dans son ensemble - un poste auquel il a été confirmé l'an dernier.
D'après les sources, une série de crises, notamment les problèmes dans les chaînes d'approvisionnement, ont poussé le principal avionneur mondial à changer ses plans: au lieu de préparer une potentielle succession, est désormais examinée la possibilité de réorganiser la direction afin de renforcer le contrôle industriel et de permettre à Guillaume Faury de disposer de davantage de temps pour d'autres priorités.
Le calendrier d'une telle réorganisation et les prérogatives du nouveau rôle demeurent incertains et dépendent de l'aval du conseil d'administration, qui n'est pas garanti, ont déclaré les sources. L'une d'entre elles a souligné que la décision était loin d'être automatique.
Airbus a indiqué via un porte-parole ne "pas commenter les rumeurs ou les spéculations concernant des changements organisationnels ou de personnel".
Toute discussion sur la structure de la direction d'Airbus s'avère sensible du fait de traditionnelles querelles internes et, parfois, de relations industrielles tendues entre les pays fondateurs du groupe qui disposent toujours d'une participation au capital: la France, l'Allemagne et l'Espagne.
Airbus dit ne plus être politisé depuis qu'un accord a été trouvé il y a dix ans pour limiter les ingérences gouvernementales.
CLIMAT
Mais une nouvelle structure de direction devrait inévitablement susciter des comparaisons avec l'ère Fabrice Bregier, ancien patron de l'aviation commerciale d'Airbus, qui a quitté le groupe en 2018 après une lutte de pouvoir avec le président exécutif de l'époque, Tom Enders.
Le groupe entend ne pas laisser place à des failles organisationnelles comme celles aperçues dans le passé, mais doit trouver un équilibre avec la nécessité de donner une autorité claire à un éventuel nouveau directeur de son pôle d'avions commerciaux, a dit l'une des sources. Cela pourrait entrer en collision avec le fonctionnement de Guillaume Faury, très impliqué dans toutes les activités, a-t-elle ajouté.
Selon les sources, Airbus pourrait opter pour ce nouveau rôle pour un cadre considéré comme loyal à Guillaume Faury, tel Bruno Even, directeur de la division hélicoptères. On ne sait pas si Even, lui aussi Français, serait intéressé par un tel poste.
Cette réorganisation rapprocherait Airbus du modèle adopté par son rival américain Boeing (NYSE:BA), où chaque division dispose de son propre patron.
Si des initiés ont estimé qu'il était pertinent pour Airbus de combiner le rôle de président exécutif et de patron de l'aviation commerciale en 2019, la pandémie de COVID et la guerre en Ukraine ont depuis lors redessiné l'environnement stratégique.
Des analystes ont noté que le climat s'était apaisé chez Airbus après des années de querelles internes. Toutefois, plusieurs cadres du groupe ne faisant pas partie du premier cercle de Guillaume Faury ont quitté l'entreprise ces dernières années, laissant un vide en terme d'expérience dans la production d'avions commerciaux.
Après un début d'année au ralenti, les livraisons d'appareils d'Airbus se sont accélérées en mai et en juin. Le groupe, qui doit publier mercredi ses résultats semestriels, reste toutefois fixé sur des objectifs de production ambitieux.
(Reportage Tim Hepher; version française Jean Terzian)